Diffamation raciale

La diffamation raciale est la diffamation collective motivée par des considérations de race et ayant pour but d'exciter à la haine des citoyens ou habitants.

Droit par pays

Droit américain

En droit américain, la possibilité d'adopter des lois contre la diffamation collective ou diffamation de groupe (anglais : group libel) est limitée par le premier amendement de la Constitution des États-Unis. L'arrêt Beauharnais v. Illinois[1] (1952) de la Cour suprême des États-Unis a toutefois reconnu la reconnu la constitutionnalité d'une loi de l'État de l'Illinois qui interdisait la diffamation raciale et la diffamation en fonction d'une catégorie sociale. Bien que ce précédent n'a jamais été invalidé, des décisions ultérieures de la Cour suprême des États-Unis ont élargi la portée de la liberté d'expression de manière importante[2].

Droit canadien

Dans l'arrêt R. c. Zundel, la Cour suprême du Canada traite du sujet de la diffamation collective en contexte pénal[3] et elle mentionne le terme « diffamation raciale ». Il n'existe pas d'infracion de « diffamation raciale » dans le Code criminel, mais les faits qui seraient punis sous le délit de diffamation raciale dans d'autres pays sont punis sous d'autres chefs d'accusation tels que l'incitation publique à la haine, la fomentation volontaire de la haine et la fomentation volontaire de l'antisémitisme[4] lorsque les critères de ces infractions connexes sont remplis. Dans cet arrêt Zundel, la Cour suprême a d'ailleurs jugé que l'infraction de publication de fausses nouvelles ne peut pas être utilisée dans un contexte factuel de diffamation raciale car elle viole la liberté d'expression de la Charte canadienne des droits et libertés[5].

Par ailleurs, bien qu'il existe une infraction de libelle diffamatoire dans le Code criminel[6], celle-ci n'est presque jamais utilisée et la diffamation est ordinairement traitée comme un sujet de droit civil seulement. En droit civil, la diffamation collective n'existe pas lorsque les propos diffamatoires se sont dilués dans une foule trop grande de personnes (arrêt Bou Malhab c. Diffusion Métromédia CMR inc.)[7]. Mais a contrario, la diffamation collective (raciale ou autrement) peut exister en droit civil si le nombre de personnes diffamées n'est pas trop grand (arrêt Calego International inc. c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse[8], où un employeur est condamné à payer des dommages-intérêts car son représentant a lancé une pluie d'injures diffamantes à ses employés asiatiques.).

Droit français

De 1939[9] à 1940 puis de 1958 jusqu'en 1972[10], la diffamation « envers un groupe de personnes (...) qui appartiennent, par leur origine, à une race ou à une religion déterminée » « lorsqu'elle aura eu pour but d'exciter à la haine entre les citoyens ou habitants » constitue un délit pénal passible d'un emprisonnement de un mois à un an et d'une amende de 1 000 F à 1 000 000 de francs[11]. En 1972 la circonstance aggravante est étendue à la diffamation « en raison de l[']origine ou de l[']appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » tandis que la condition d'excitation à la haine entre habitants ou citoyens disparait au titre de lutte contre le racisme[12]. Depuis la réforme du Code pénal de 1994 et la loi de 2004 portant la création de la HALDE, elle s'est étendue à la diffamation « envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap » ; elle est passible d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 45 000 , ou de l'une de ces deux peines[13].

Notes et références

  1. 343 U.S. 250
  2. R.A.V. v. City of St. Paul, 505 U.S. 377; Virginia v. Black, 538 U.S. 343 (2003 ; Matal v. Tam, 582 U.S. 218 (2017)
  3. [1992] 2 RCS 731
  4. Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 319, <https://canlii.ca/t/ckjd#art319>, consulté le 2024-08-27
  5. Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11, art 2, <https://canlii.ca/t/dfbx#art2>, consulté le 2024-08-27
  6. Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 298, <https://canlii.ca/t/ckjd#art298>, consulté le 2024-08-27
  7. 2011 CSC 9
  8. 2013 QCCA 924
  9. Décret-loi du 21 avril 1939 dit Loi Marchandeau— Voir Proposition de loi 2003
  10. Le droit français contre le racisme Pascal Cobert, 24 février 2008 [PDF]
  11. Article 32, version en vigueur jusqu'au 2 juillet 1972 Légifrance
  12. Article 32 de la loi de 1881, version en vigueur au 2 juillet 1972 : « La diffamation commise par les mêmes moyens envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée sera punie d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de 300 F à 300.000 F ou de l'une de ces deux peines seulement [*lutte contre le racisme*]. »
  13. Article 32, actuelle loi 1881, version consolidée au 7 août 2009.
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