Théorème de Schur-Horn

En mathématiques, le théorème de Schur-Horn est un théorème d'algèbre linéaire caractérisant l'ensemble des diagonales possibles, pour une matrice hermitienne de valeurs propres prescrites.

Énoncé

Étant donnés 2N réels

d 1 d 2 d N e t λ 1 λ 2 λ N , {\displaystyle d_{1}\geq d_{2}\geq \ldots \geq d_{N}\quad {\rm {et}}\quad \lambda _{1}\geq \lambda _{2}\geq \ldots \geq \lambda _{N},}

s'il existe une matrice hermitienne d'éléments diagonaux les di et de valeurs propres les λi, alors (théorème de Schur[1],[2])

i = 1 N d i = i = 1 N λ i e t n < N i = 1 n d i i = 1 n λ i . {\displaystyle \sum _{i=1}^{N}d_{i}=\sum _{i=1}^{N}\lambda _{i}\quad {\rm {et}}\quad \forall n<N\quad \sum _{i=1}^{n}d_{i}\leq \sum _{i=1}^{n}\lambda _{i}.}

Réciproquement, si ces conditions sont vérifiées alors (théorème de Horn[3],[4]) il existe une matrice hermitienne, et même une matrice réelle symétrique, d'éléments diagonaux les di et de valeurs propres les λi.

Reformulation

Article détaillé : Majorisation.

Pour deux vecteurs de ℝN,

d = ( d 1 , d 2 , , d N ) e t λ = ( λ 1 , λ 2 , , λ N ) , {\displaystyle d=(d_{1},d_{2},\ldots ,d_{N})\quad {\rm {et}}\quad \lambda =(\lambda _{1},\lambda _{2},\ldots ,\lambda _{N}),}

il existe une matrice hermitienne (et même alors une matrice réelle symétrique) d'éléments diagonaux les di et de valeurs propres les λi si et seulement si

λ d {\displaystyle \lambda \succ d} (lire : « λ majorise d »),

c'est-à-dire — par définition — si, lorsqu'on réordonne de façon décroissante les composantes de ces deux vecteurs, l'égalité et les N – 1 inégalités ci-dessus sont vérifiées.

Or il existe des caractérisations équivalentes de la majorisation :

  • λ majorise d si et seulement s'il existe une matrice bistochastique S telle que d = Sλ.
  • λ majorise d si et seulement s'il existe une suite finie de vecteurs dont le premier est λ, le dernier est d et le successeur de chaque vecteur x est une combinaison convexe de x et de l'un de ses transposés.

Démonstration

Notons Λ la matrice diagonale des λi.

⇒ : Soit A = ( a i , j ) {\displaystyle A=(a_{i,j})} une matrice hermitienne N × N, de valeurs propres les λi et de diagonale les di. Puisque A est normale, il existe une matrice unitaire U telle que A = UΛU* donc i = 1 , , N d i = a i , i = j = 1 N | u i , j | 2 λ j , {\displaystyle \forall i=1,\ldots ,N\quad d_{i}=a_{i,i}=\sum _{j=1}^{N}|u_{i,j}|^{2}\lambda _{j},} autrement dit, en notant si,j = |ui,j|2 et S = ( s i , j ) {\displaystyle S=(s_{i,j})}  : d = S λ . {\displaystyle d=S\lambda .}

Comme U est unitaire, S est bistochastique, ce qui prouve que λ majorise d.

⇐ : Réciproquement, supposons que λ majorise d. On peut alors passer de λ à d par une suite finie de vecteurs dont chacun est obtenu à partir du précédent en ne modifiant que deux composantes uv, augmentant u d'au plus v – u et diminuant v d'autant. Construisons par récurrence, pour chaque vecteur x de cette suite (en particulier pour le dernier, ce prouvera l'implication), une matrice réelle symétrique de valeurs propres les λi et de diagonale x. Pour le premier vecteur, λ, la matrice Λ convient. Supposons construite une matrice A = ( a i , j ) {\displaystyle A=(a_{i,j})} pour le vecteur x et construisons une matrice B pour son successeur y, qui ne diffère de x que par deux coordonnées, par exemple, pour simplifier les notations : y1 = x1δ et y2 = x2 + δ avec δ compris entre 0 et x1x2. D'après le théorème des valeurs intermédiaires, il existe un angle θ entre 0 et π/2 tel que

δ = ( x 1 x 2 ) sin 2 θ + a 1 , 2 sin ( 2 θ ) . {\displaystyle \delta =(x_{1}-x_{2})\sin ^{2}\theta +a_{1,2}\sin(2\theta ).}

Soient Rθ la matrice de rotation plane d'angle θ et IN–2 la matrice identité de taille N – 2. La matrice diagonale par blocs P := ( R θ 0 0 I N 2 ) {\displaystyle P:={\begin{pmatrix}R_{\theta }&0\\0&I_{N-2}\end{pmatrix}}} est orthogonale, et un calcul immédiat montre que B = PAPT convient.

Notes et références

  1. (de) Issai Schur, « Über eine Klasse von Mittelbildungen mit Anwendungen auf die Determinantentheorie », Sitzungsber. Berl. Math. Ges., vol. 22,‎ , p. 9-20.
  2. (en) Albert W. Marshall, Ingram Olkin et Barry C. Arnold, Inequalities: Theory of Majorization and Its Applications, Springer, , 2e éd. (ISBN 978-0-387-40087-7, lire en ligne), chap. 9, Theorem B.1, p. 3001re éd. : Marshall et Olkin, Academic Press, 1979 (ISBN 978-0-12-473750-1).
  3. (en) Alfred Horn, « Doubly stochastic matrices and the diagonal of a rotation matrix », Amer. J. Math., vol. 76,‎ , p. 620-630 (JSTOR 2372705).
  4. Marshall, Olkin et Arnold 2011, chap. 9, Theorem B.2, p. 302.

Article connexe

Inégalité de Hadamard

  • icône décorative Portail de l’algèbre